Séquoia

Un nom qui éveille notre imagination, utilisé à toutes les sauces (de la maroquinerie au camping, en passant par l'informatique ou l'immobilier). Il évoque les grands espaces de l'Ouest américain, les Indiens et surtout... les arbres géants.

Des arbres géants venus d’un autre âge, au delà des deux mille ans d’histoire.

Certains séquoias toujours debout aujourd’hui étaient déjà centenaires quand Jules César entrait en Gaule. Une réalité qui nous donne le tournis.  Des arbres lointains aussi, la Californie (leur sanctuaire naturel) c’est bien loin pour la majorité des Européens…

Groupe de séquoias géants © Marc Meyer

Et puis un beau jour au coin d’un parc, sur un grand boulevard ou au creux d’une forêt : c’est la rencontre… En voilà un, oui c’en est un : un séquoia géant, ici, près de chez vous! Oh bien sûr ils n’ont pas deux mille ans comme leurs grands-pères, mais l’Europe est truffée de séquoias, du Portugal à la Finlande, et de l’Irlande à la Roumanie.

Des semences de séquoias seront ramenées dans les bagages des voyageurs à partir de la seconde moitié des années 1850, accompagnées des récits extraordinaires sur le Nouveau Monde et ses démesures.  Des séquoias seront plantés un peu partout. Ils survivront et grandiront, dans les jardins publics ou botaniques bien sûr, et dans les jardins des demeures et manoirs de la Belle Epoque : signes extérieurs de réussite de la Révolution Industrielle. 

Jouer au pied d'un séquoia géant, c'est possible dans nombre de nos jardins publics! © Marc Meyer
Dans nos jardins publics, le séquoia n'est souvent pas très loin. Encore faut-il le reconnaître... © Marc Meyer
The sky is the limit! © Patrick Bradane Agés de 100 à 150 ans maximum, les séquoias géants européens ont déjà fière allure. ©Patrick Bradane

Cette adoption concernera surtout le séquoia géant. Elle fût d’autant plus facile que l’arbre peut très bien se planter de façon isolée, tant d’un point de vue ornemental que sanitaire : l’arbre est particulièrement résistant. Bien qu'aussi apprécié, le séquoia sempervirens, moins résistant au gel, verra son aire de répartition limitée par ce facteur (zones maritimes ou océaniques tempérées).

De nos jours ces séquoias pointent fièrement au-dessus du paysage. Pour un œil averti, il est relativement facile de les distinguer à l’horizon, même à une certaine distance (les « chasseurs de séquoias » qui alimentent régulièrement l’inventaire ne me contrediront pas).

Les grands spécimens, âgés de 100 à 150 ans, peuvent atteindre des circonférences autour des dix mètres et des hauteurs allant jusqu’à 50 mètres. Ils sont d’ors et déjà les plus grands arbres dans plusieurs pays d’Europe ou ils le deviendront dans les années à venir.

Superbe ensemble de séquoias sempervirens  à Pau © Nathaly Perez
Les séquoias à feuilles d'if sont bien présents dans la moitié ouest de la France. Ici un bel exemple à Pau (Square Besson). © Nathaly Perez

Malgré cette importation réussie, le séquoia géant ne s'est jamais reproduit naturellement en Europe. Le sempervirens non plus, si ce n'est par rejet de souche. Ce sont donc des arbres non invasifs, ils ne représentent aucun danger pour la flore indigène. Parcontre le séquoia géant est un formidable allié en matière d'absorption de CO2 : imaginez un instant les tonnes de carbone stockées pour des centaines d'années dans un tronc de plus de 10 mètres de circonférence et de 50 mètres de haut ! Aucun autre arbre ne rivalise avec lui en ce domaine.

Rappelons que chez eux en Californie, nos deux séquoias cumulent les records. Le séquoia géant est la plus grande créature vivante au monde (le plus grand arbre du monde en volume), et le séquoia sempervirens est quant à lui le plus grand arbre du monde en hauteur (115,5 m de haut).

Ces arbres exceptionnels méritaient bien un site Internet à eux tout seuls. Peut-être croisez-vous tous les jours sans le savoir un séquoia géant sur votre chemin? J'espère que ce site vous permettra de mieux les apprécier.


Un seul nom pour deux arbres...

Trois arbres différents (en comptant le métaséquoia) partagent ce joli nom chargé d’histoire, nom qui évoque plus communément les deux espèces californiennes : le séquoia géant (sequoiadendron giganteum) et le séquoia à feuilles d'if ou séquoia toujours vert (sequoia sempervirens). Cette double dénomination engendre une confusion que l’on retrouve dans plusieurs langues (secuoya en espagnol, redwood en anglais, etc.).  Nombreux sont les livres, articles, sites Internet qui mélangent allègrement les deux espèces, attribuant à l’une les qualités de l’autre. Une page de ce site vous permet d’éviter ce piège.

Il faut dire que la classification botanique des deux arbres ne se fit pas sans mal, avec plusieurs modifications successives à travers les décennies. D’abord classés dans un même genre botanique (sequoia), nos deux arbres ont désormais leur propre genre distinct, tout comme le troisième larron, car il y en a un : le métaséquoia (appelé aussi séquoia de Chine).

Tout commence avec le séquoia sempervirens. C'est logique, c'est un arbre côtier, les Européens l'ont rencontré bien avant son cousin. D'abord appelé taxodium sempervirens (1824), il sera rebaptisé Sequoia sempervirens par Endlicher en 1847. Bien que la chose soit parfois contestée, il est en général admis qu'Endlicher aurait choisi ce nom en l'honneur du chef indien (cherokee) Sequoya.

Jeune séquoia âgé de deux mois © Marc Meyer
Sequoiadendron giganteum... âgé de deux mois!

Après sa découverte de 1852, le séquoia géant se verra attribué toute une série de noms successifs, en fonction du classement botanique de l'arbre, ou du... patriotisme du botaniste!

Citons: Taxodium giganteum (Kelogg et Behr) - abandonné par reclassification botanique, Sequoia gigantea (Torrey) - refusé car déjà utilisé pour une sous-espèce de sempervirens, Wellingtonia gigantea (Lobb) - en l'honneur du vainqueur de Waterloo (Lobb étant britannique!), fît scandale auprès des Américains (fraîchement indépendants), Washingtonia californica (Winslow) - par réaction au précédent, refusé car 'washingtonia' désignait déjà un palmier, Sequoia wellingtonia (Seeman) - par tentative de compromis. Ce n'est qu'en 1938, soit 86 ans après sa découverte, que Buchholtz mit tout le monde d'accord avec Sequoiadendron giganteum. Buchholz avait tout simplement démontré que les deux séquoias ne faisaient pas partie du même genre botanique, tout en ayant bien sûr des liens de parenté.

L'histoire du métaséquoia est bien différente. Connu seulement à l'état fossile, cet arbre fût découvert en 1941, bien vivant, dans la province de Sichuan en Chine. On le trouve désormais dans de nombreux jardins publics. Proche du cyprès chauve, le métaséquoia a la particularité de perdre son feuillage en hiver (contrairement aux deux autres séquoias). Bel arbre de croissance rapide, le métaséquoia est cependant loin d'atteindre les dimensions monumentales de ses deux compères californiens.


Sequoyah

Même si un doute subsiste quant à la motivation d'Endlicher dans le choix du nom de séquoia, le nom du chef indien est désormais associé au nom de l'arbre. Sequoyah est entré dans l'histoire pour avoir créé l'alphabet cherokee. A partir de 1821, cet alphabet sera utilisé par l'ensemble de la nation Cherokee. Il permettra la parution du premier journal en langue amérindienne: le "Cherokee Phoenix". L'alphabet cherokee sera également utilisé pour la rédaction de la Consitution Cherokee.

Sequoyah, inventeur de l'alphabet Cherokee

Déporté vers le "territoire indien", actuel Oklahoma, Sequoyah quittera celui-ci pour se diriger vers le Mexique où il décède en 1843. Le peuple Cherokee n'apprendra sa mort qu'en 1845, soit deux avant qu'Endlicher associe son nom aux plus grands arbres du monde. Il faut savoir qu' Endlicher était non seulement botaniste mais aussi linguiste et grammairien. Vu l'oeuvre accomplie par Sequoyah, le choix d'Endlicher paraît d'autant plus évident.


Le futur : pas d'avenir sans racines...

En comparaison avec leurs cousins américains, nos plus vieux séquoias européens ne sont finalement encore que des enfants. Nul ne peut dire aujourd'hui s'ils atteindront les dimensions phénoménales que l'on rencontre outre-Atlantique. Mais il semble bien que certaines parties du continent présentent des conditions optimales pour la croissance des séquoias. C'est le cas de la façade ouest, du Portugal à l'Irlande, mais aussi d'une large bande comprenant l'Alsace, le Baden-Wurtemberg et la Suisse par exemple.

Séquoias géants à Weinheim, Baden-Wurtemberg © Atropa
Dans l'Exotenwald à Weinheim en Baden-Wurtemberg, ces séquoias géants ont franchi les 50 mètres de hauteur.© Atropa

La pluviosité joue un rôle majeur dans l'épanouissement des séquoias. Les modifications climatiques en cours seront déterminantes sur leur développement. Dans les régions qui ont connu des sécheresses à répétition ces dernières années, les grands séquoias dépérissent parfois très rapidement. C'est que les besoins en eau du séquoia augmentent avec sa croissance : un grand sujet a besoin d'une quantité d'eau très importante. Sachant que son éspérance de vie est au delà des 2000 ans, un séquoia de 100 ou 150 ans est un jeune arbre en pleine croissance : il ne va pas l'interrompre. Le jour où ses besoins en eau dépasse le niveau que peut lui apporter son envrionnement, l'arbre franchit un seuil fatidique et le dépérissement s'amorce.

Le séquoia géant récolte jusqu'à 25% de l'eau dont il a besoin via son feuillage, ce pourcentage peut osciller entre 30 et 40% chez le séquoia sempervirens (l'arbre du brouillard). Les séquoias possèdent un système racinaire en étoiles. Les racines courrent à l'horizontale sous la surface et captent les eaux de pluie dans un rayon pouvant atteindre 30 mètres avec une profondeur maximale d'1m50. Ces arbres ne possèdent pas de racine centrale verticale qui leur permettrait d'aller pomper l'eau plus profondément lors des périodes plus sèches. Ces deux facteurs mettent nos séquoias en bien mauvaise posture lors de sécheresses ou de canicules prolongées.

Un autre aspect déterminant pour l'avenir de nos grands spécimens découle également du facteur racinaire, à savoir le type de surface dans l'alentour immédiat de l'arbre. Beaucoup de séquoias géants ont été plantés en milieu urbain. Si les sols aux alentours sont bitumés et empêchent l'eau de percoler jusqu'au racines courant sous la surface, l'arbre est condamné à plus ou moins court terme (le fameux seuil de croissance évoqué précédemment).

Allée de séquoias géants à Benmore en Ecosse © Tim Bekaert
Le climat des Iles Britanniques convient bien aux séquoias: ici au Jardin Botanique de Benmore en Ecosse,
où pousse le plus grand séquoia géant européen (54 mètres). Photo en provenance du site de Tim Bekaert

Heureusement pour eux et pour nous, il y a des séquoias que l'implantation met à l'abri de ce genre de mésaventures. Ceux-là continueront leur course vers le ciel. A quand les quinze mètres de circonférence? Allez, je prends le pari : rendez-vous en 2025!



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